(Interview) run SOFA : « On aime bien s’enfermer, jouer à deux guitares et voir ce qu’il se passe »

Subtile mélange entre rock et hip-hop, runSOFA est la révélation belge de ce début d’année. Retour sur notre rencontre avec Julien et Antoine, les deux leaders de ce projet hybride, lors de leur release party au Botanique le 9/02 dernier.

Renaud : Vous venez de sortir votre premier album le 26/01, comment vous sentez-vous à quelques heures de le dévoiler au public du Botanique ?

 

Julien Tassin, guitariste : On est super excités ! On est super chaud de présenter notre album ce soir. Cela fait quelques mois que l’album a été enregistré et plus de deux ans que l’on travaille dessus, on est donc super excités et on espère que l’on va réussir à emporter tout le monde avec nous ce soir.

Renaud : Comment est né le projet runSOFA ? Depuis combien de temps travaillez-vous ensemble ?

 

Antoine Romeo, chanteur : On se connaît depuis toujours, on est cousins en fait. On a grandi dans la même famille et on a chacun fait de la musique de notre côté. On a chacun eu des projets. A chaque fois, j’allais voir les concerts de Julien, et lui s’intéressait à ce que je faisais. On a toujours été très complice. A force de trainer et d’écouter de la musique ensemble, on s’est décidé à créer un projet commun. De là est né Zero Tolerance For Silence (ndlr : projet précurseur de runSOFA). Un projet qui était plus expérimental et plus noisy. On a essayé énormément de chose avec ce groupe là. En 2015, on a enregistré de la nouvelle musique et on a senti qu’on devait changer de nom. On a choisi runSOFA, et aujourd’hui nous voilà !

Renaud : Vous avez grandi ensemble. Avez toujours eu cette connexion musicale ?

 

Julien : A la base on a les mêmes influences. On écoutait les mêmes choses parce qu’on écoutait ce que nos oncles écoutaient. Pendant l’adolescence, évidemment chacun à commencer à écouter ses trucs. Antoine, quand il a commencé la guitare, il était à fond dans Nirvana puis dans le métal. Moi j’étais plus dans le Blues puis je me suis tourné vers le Jazz. Antoine aussi écoutait du Jazz. Et tout ça à un moment donné s’est interconnecté. On a toujours été « en connexion » l’un avec l’autre.

Antoine : On a toujours été intéressé par des choses communes même si on a chacun eu notre parcours. On vient d’une famille de musiciens. Tout au long de notre vie, on toujours aimé partager de la musique ensemble.

Renaud : La pochette de l’album a l’air très personnelle, une photo de famille ? Qu’est-ce qu’elle représente pour vous ?

 

Julien : La pochette représente la complicité que nous avons depuis toujours. C’est une photo de nous, enfants. Déjà quand Antoine était bébé, je trainais souvent avec lui, on jouait ensemble. Ce qui est chouette sur cette photo c’est qu’il chante déjà. Il a déjà quelque chose à dire et c’est le nom de l’album (ndlr : l’album s’appelle Say.)

Antoine : Il y a beaucoup de choses qui s’entrecoupent parfois. Ici, il se fait qu’on s’était mis à fouiller dans les photos de famille, comme ça peut arriver à tout le monde. C’est un super moment parce que tu retrouves de vieilles photos que tu n’avais même jamais vue et que tes parents avaient gardées dans une boîte pendant 20 ans. On a retrouvé plein de photos qu’on a utilisé pour nos visuels. Lorsqu’on est tombé sur celle-là, on ne l’a pas utilisée directement parce qu’on s’est dit qu’elle pourrait être une pochette potentielle. Et finalement, il se fait qu’elle a fini sur la cover de notre album. C’est comme le nom de l’album, il s’est présenté à nous de manière spontanée. On ne savait pas qu’il allait s’appeler Say. et finalement les choses se sont bien entrecoupées. On ne s’est jamais assis autour d’une table en se demandant comment on allait appeler cet album. C’est ça qui est cool en fait !

B9714628829Z.1_20180202155026_000+G03AJLJQJ.2-0runSOFA a sorti son premier album intitulé Say. le 26 Janvier dernier.

Renaud : Julien, tu as étudié le Jazz au conservatoire de Bruxelles. Dans quelle mesure la musique improvisée vous a-t-elle influencée dans le processus de création de cet album ?

 

Julien : On a une démarche intuitive. On pratique très souvent l’improvisation libre, à deux. On a écrit beaucoup de morceaux comme cela. On aime bien s’enfermer, jouer à deux guitares et voir ce qu’il se passe. C’est inspirant, ça nous donne des nouvelles idées. L’influence du Jazz elle est surtout à ce niveau là dans le sens liberté, intuition, improvisation. Mais pas intellectualisation (rires).

Antoine : Dans la composition, c’est comme ça que ça se passe en fait. On peut vraiment se laisser aller pendant plusieurs heures, de manière libre. Au fur et à mesure de cette improvisation, il peut arriver que Julien trouve un son qu’il aime bien, que moi je trouve un sample ou un effet de voix. On réécoute le lendemain et on se dit parfois « Ouais ce truc là on pourrait le réutiliser ». On ne fait pas de distinction entre l’improvisation et la musique qu’on produit sur scène. Les deux sont interconnectés et ça vient de notre culture qui est hybride.

Renaud : Le son de votre album est assez particulier. Avez-vous d’abord travaillé sur le son du groupe avant de l’enregistrer en studio, ou êtes-vous rentrés en studio avec la volonté de définir votre son en compagnie de vos producteurs (notamment le guitariste des Van Jets) ?

 

Julien : Je pense que les producteurs ont un rôle super important. Ils t’aident à affirmer l’univers que tu es en train de dessiner, ils t’aident à définir les contours. C’était super ! Ils ont beaucoup travaillé en pré-production. Ils venaient en répète et enregistraient. Ils proposaient des idées, on travaillait dessus et on rendait un feedback. On a beaucoup travaillé comme ça de telle manière que lorsqu’on est entré en studio, on savait très bien où on en était. Ca a été très vite !

Antoine : C’est une très bonne question ! A notre niveau, on ne peut pas se permettre de louer un studio pendant deux mois. Jusqu’à présent on n’a pas vraiment pu expérimenter en studio. En tout cas pas énormément. Nos producteurs nous ont encouragé à travailler en pré-production comme l’a dit Julien. Ils faisaient déjà des mix avant qu’on ne rentre en studio. On savait donc déjà ce qu’on voulait faire. Après il y a eu des petites surprises, des petits moments magiques bien sûr.

Renaud : Vous venez de la ville de Charleroi, qui est en plein renouvellement. Vous êtes considérés comme des ambassadeurs de l’essor culturel de la ville. Cela vous tient-il à cœur ?

 

Antoine : Depuis qu’on fait de la musique, on a toujours mis en avant le fait qu’on venait de Charleroi. Je sais pas trop comment l’expliquer mais ça nous a marqué de grandir là. On se sent fort attaché à Charleroi, et ce depuis toujours. Aujourd’hui il y a ce renouveau, beaucoup de choses qui s’allient (Il y a eu la restructuration du centre-ville, des salles à Charleroi qui sont de plus en plus plébiscitées). Nous, c’est naturel qu’on se retrouve dans cette mouvance là. On l’était déjà avant que tout le monde parle de Charleroi comme c’est le cas aujourd’hui. On était déjà là-dedans et on a été pris par ce flow là. Pour nous c’est hyper important.

Renaud : Vous parliez donc de salles à Charleroi. Vous étiez à l’Eden le 2/02. Un grand moment pour vous de présenter votre album chez vous ?

 

Julien : C’était super parce que il y avait pas mal de gens, et surtout plein d’amis et la famille. On était vraiment chez nous. Ici (à Bruxelles), ça va être un autre délire. Ce sera différent mais c’est ça qui est chouette. L’Eden, c’était le seul endroit à Charleroi où on avait pas encore eu l’occasion de jouer. Il était temps qu’on le fasse.

Antoine : Quand tu fais ta release party chez toi, à l’Eden, ça fait plaisir. On en rêvait depuis longtemps. On espère y rejouer dans un an, dans la grande salle qui sait (rires). En tout cas, c’est un cheminement. Y’a rien qui s’est fait d’un coup. Il y a quatre ans, on jouait au Vecteur qui est une salle beaucoup plus petite. Y’avait 50 personnes mais on était très contents. On était à fond, et on était à la place où on devait être finalement. 4 ans après, remplir l’Eden avec un album fraichement sorti, vendre des vinyles, ça nous a fait plaisir et c’était beau. Oui c’était vraiment beau.

Renaud : Vous avez fait quelques dates en Angleterre après un premier EP. Pour le futur, vous avez prévu de repartir à l’étranger ?

 

Julien : C’est clair qu’on aimerait bien retourner en Angleterre. C’était une super expérience ! On a des potes là-bas avec qui on a eu l’occasion de jouer. C’était super ! C’est un de nos rêves de faire une vraie tournée là-bas, je pense qu’on y retournera bientôt. On est en train d’y penser, clairement.

Antoine : De manière générale, ce dont on a envie après 2 ans de travail dans l’ombre, c’est de partager cette musique avec un maximum de gens (que ce soit en Angleterre, ici en Belgique, ou même en France). On espère voyager et communier avec un maximum de gens, c’est ça le but !

Ils seront de retour à Bruxelles le 5 Mai dans le cadre des Nuits Botanique.

Interview : Renaud VERSTRAETE