Steven Wilson, ou celui qui donna un coup de pied dans les préjugés autour de la pop

Steven Wilson ? Ce nom ne vous dit peut-être rien si vous n’avez pas été initiés au monde foisonnant de ce multi-instrumentiste anglais. Pourtant, il a acquis une notoriété non négligeable d’une population très mélomane, les fans de progressif. Notoriété s‘étant accentuée lors de la sortie de son dernier album « To The Bone » qui a provoqué par la même occasion, la surprise, voire la colère de sa « fan-base traditionnelle ». Découvrons ensemble cet artiste qui sévit dans le monde de la musique depuis maintenant plus de 30 ans.

Difficile de rester de marbre quand on s’écoute son premier Steven Wilson (si ce n’est pas encore fait je vous conseille le sublimissime Routine qui démontre très bien ce dont je vais vous parler). Que ce soit en solo ou avec les différents groupes dans lesquels il a officié (Porcupine Tree, Storm Corrosion, No-Man, Blackfield, Bass Communion, …), cet artiste a la faculté de transmettre des émotions que l’on croyait impossibles à ressentir par la musique. Angoisse, tristesse, amour, euphorie, héroïsme, nostalgie, stress, admiration, haine, … Pas une émotion ne lui échappe au point de se demander si cet homme ne serait pas entièrement conçu pour cela.

Le plus bel exemple est sans doute lorsqu’en 2012, je me trouvais à l’Ancienne Belgique afin d’y voir performer l’artiste. Alors que le concert battait son plein, une personne de mon entourage (dont je tairai le nom, vous en conviendrez) a dû quitter la salle, se sentant soudain oppressée par l’ambiance pesante de ce qui provenait tout droit de la scène. Steven Wilson venait alors présenter son second album solo, « Grace For Drowning » qui est sans doute l’une des pièces les plus sombres de son œuvre.

Mais comme je le disais, l’artiste est un cador quand il s’agit de transmettre de la tristesse. Sa musique Routine a même été qualifié par le site humoristique 9gag comme l’une des dix chansons les plus tristes qui existent. Cette mélancolie est tellement présente dans certaines de ses chansons que ses fans en ont fait un « même » récurrent dans les différentes pages Facebook consacrées à la musique progressive. En voilà une poignée d’exemples pour vous prouver à quel point mes dires sont avérés.

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Mais revenons à la musique ! D’une mélancolie rare, l’artiste a su se faire une place dans une des niches de la musique où les mélomanes ne jurent que pour Pink Floyd, King Crimson, Emerson, Lake and Palmer et plus récemment, les Américains de Dream Theater. À tel point qu’en 30 ans de carrière, sa notoriété se trouvait limitée à une franche réduite de personnes. Boudé par l’industrie de la musique, il s’est régulièrement exprimé à ce sujet. En 2016, il déclarait qu’avec 25 albums à son actif et une carrière de plus de 20 ans, il se sentait « frustré » de ne pas passer à la radio alors que certains artistes remplissent les plus grandes salles avec « uniquement une bonne chanson ».

Il n’en est pas pour autant démotivé, il sait que pour avancer, il est nécessaire d’évoluer, de continuellement se renouveler et de toujours surprendre son public. Comme Bowie l’avait fait avant lui… Il est majoritairement passé par le rock progressif mais il s’est essayé à différents autres styles comme le métal, le post-punk, ou encore le psychédélisme. Et c’est d’ailleurs contre toutes attentes, qu’en 2017, il sort « To The Bone », un album voulant ouvertement moderniser la pop indé, surprenant son public traditionnel et lui donnant accès aux grandes radios.

« Surprendre » est un faible mot. Il faut dire que l’artiste a l’habitude d’être présent là où on ne l’attend pas. Ici, le terme « choquer » conviendrait plus adéquatement. Certains se sont trouvés offusqués de le voir se diriger vers ce que plusieurs appellent la facilité de la pop mainstream. Mais peu à peu, son fidèle public se retrouve une nouvelle fois séduit par la volonté de Steven Wilson d’aller plus loin avec ce qui peut être considéré comme la quintessence de la simplicité. Lors de son concert à l’ancienne Belgique ce 9 mars, il déclarait, avec une pointe de cynisme envers les critiques, que la pop n’est pas forcément péjorative et que des artistes comme les Beatles, Prince ou encore Abba ont permis à la musique d’évoluer.

Le virage de ce dernier album n’est sans aucun doute pas le dernier que prendra Steven Wilson durant sa longue carrière. Cet opus lui aura permis d’atteindre un public qui n’était peut-être même pas au courant de son existence et il aura prouvé à tous que les préjugés dans la musique peuvent être dépassés.

Avant de conclure cette chronique, je voudrais vous proposer une playlist reprenant certains des grands morceaux de sa carrière démontrant la capacité d’adaptation et de composition de cet artiste dont, j’espère, vous allez tomber amoureux.se.

Article : Arno GOIES